Le savant et le politique de Max Weber

Max Weber nous propose une analyse sociologique des carrières scientifiques et politiques.

Couverture du livre Max Weber le savant et le politique

Résumé du livre Le savant et le politique de Max Weber

La science, la politique : deux vocations profondément divergentes. L’une requiert modestie et disponibilité de l’esprit. L’autre, déchirée entre l’éthique de la conviction et l’éthique de la responsabilité, souffre d’une contradiction nécessaire qui toujours lui interdira la certitude scientifique. Telles sont les lignes directrices de cette profonde analyse, d’une urgence si actuelle à laquelle nous convie le plus grand sociologue allemand de ce siècle.

A propos de l'auteur Max Weber

Max Weber est un économiste et sociologue allemand, considéré comme l’un des principaux fondateurs de la sociologie. Il s’intéresse au sens que les individus donnent à leur action. Son œuvre et ses idées ont profondément influencé la manière dont nous comprenons la société moderne, en particulier le capitalisme.

Table des matières Le savant et le politique de Max Weber

Préface de Raymond Aron
Le métier et la vocation de savant
Le métier et la vocation d’homme politique

Caractéristiques Le savant et le politique de Max Weber

Nombre de pages

224

Langue

Française

Année de publication

1919 (1ère parution)

Éditeur

Bibliothèque 10/18

ISBN

978-2-264-031594

Mon avis sur l'ouvrage Le savant et le politique de Max Weber

L’ouvrage Le Savant et le politique regroupe deux textes du sociologue allemand Max Weber, issus de conférences prononcées en 1917 et 1919 à l’université de Munich, Wissenschaft als Beruf et Politik als Beruf.

Dans sa version traduite en français par Julien Freund, le livre est préfacé par le sociologue Raymond Aron. J’ai trouvé la lecture de cette longue préface (74 pages !) utile pour remettre les discours de Weber dans leurs contextes mais plus complexe à appréhender que les écrits mêmes de Weber.

 

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Couverture du livre Max Weber le savant et le politique

Dans son ouvrage, Weber insiste sur la passion nécessaire pour embrasser les vocations de savant ou d’homme politique ; l’acceptation pour le scientifique de se lancer dans la recherche tout en sachant que son travail sera un jour dépassé ; l’importance de la conviction pour le politique.

Weber invite le sociologue à ne pas confondre les rôles de savant et d’homme politique. Le sociologue peut participer aux débats qui agitent la société contemporaine et à la réflexion politique, Weber a lui-même fait l’expérience de l’engagement politique en devenant membre du parti social-démocrate en 1918. Il s’agit de ne pas jouer les deux rôles en même temps, de ne pas chercher à imposer ses convictions en s’appuyant sur des faits scientifiques, car le risque serait alors de perdre sa crédibilité scientifique.

Selon la distinction établie par Weber entre le politique qui vit « pour » et celui qui vit « de » la politique, nous pourrions regretter qu’à l’heure actuelle, nos hommes et femmes politiques, manquant d’inspiration et de conviction ne se mettent au service d’une cause politique qui donne un sens à leur vie mais plutôt voient dans la politique une source permanente de revenus et d’influence.

Le savant et le politique est un ouvrage accessible (tant au niveau des concepts qu’au niveau du prix 🙂 pour découvrir (un peu de) la pensée du sociologue allemand.

Extraits et concepts de l'ouvrage de Max Weber Le savant et le politique.

Le rôle considérable joué par les médiocres dans les universités

Il serait injuste d’imputer aux petits personnages des facultés ou des ministères la responsabilité d’une situation qui fait qu’un si grand nombre de médiocres jouent incontestablement un rôle considérable dans les universités. Il faut plutôt en chercher la raison dans les lois mêmes de l’action concertée des hommes, surtout dans celle de plusieurs organismes, en l’espèce dans la collaboration entre les facultés qui proposent les candidats et le ministère qui les nomme. (p.76)

L’œuvre définitive et importante est toujours une œuvre de spécialiste

C’est uniquement grâce à cette stricte spécialisation que le travailleur scientifique pourra un jour éprouver une fois, et sans doute jamais plus une seconde fois, la satisfaction de se dire : cette fois j’ai accompli quelque chose qui durera. De nos jours l’œuvre vraiment définitive et importante est toujours une œuvre de spécialiste. Par conséquent, tout être qui est incapable de se mettre pour ainsi dire des œillères et de se borner à l’idée que le destin de son âme dépend de la nécessité de faire telle conjecture, et précisément celle-là, à tel endroit dans tel manuscrit, ferait mieux tout bonnement de s’abstenir du travail scientifique. Jamais il ne ressentira en lui-même ce que l’on peut appeler l’ « expérience » vécue de la science. Sans cette singulière ivresse dont se moquent tous ceux qui restent étrangers à la science, sans cette passion, sans cette certitude que « des milliers d’années devaient s’écouler avant que tu n’aies vu la vie et d’autres milliers d’années attendent en silence »… de savoir si tu est capable de faire cette conjecture-là, tu ne posséderas jamais la vocation du savant et tu ferais mieux de t’engager dans une autre voie. (p.82)

Selon Tolstoï, la mort pour l'homme civilisé n'a pas de sens

La mort est-elle ou non un événement qui a un sens ? [La réponse de Léon Tolstoï] est que pour l’homme civilisé elle n’en a pas. Et elle ne peut pas en avoir, parce que la vie individuelle du civilisé est plongée dans le « progrès » et dans l’infini et que, selon son sens immanent, une telle vie ne devrait pas avoir de fin. En effet, il y a toujours possibilité d’un nouveau progrès pour celui qui vit dans le progrès ; aucun de ceux qui meurent ne parvient jamais au sommet puisque celui-ci est situé dans l’infini. Abraham ou les paysans d’autrefois sont morts « vieux et comblés par la vie » presqu’ils étaient installés dans le cycle organique de la vie, parce que celle-ci leur avait apporté au déclin de leurs jours tout le sens qu’elle pouvait leur offrir et parce qu’il ne subsistait aucune énigme qu’ils auraient encore voulu résoudre. Ils pouvaient donc se dire « satisfaits » de la vie. L’homme civilisé au contraire, placé dans le mouvement d’une civilisation qui s’enrichit continuellement de pensées, de savoirs et de problèmes, peut se sentir « las » de la vie et non pas « comblés par elle. En effet il ne peut jamais saisir qu’une infime partie de tout ce que la vie de l’esprit produit sans cesse de nouveau, il ne peut saisir que du provisoire et jamais du définitif. C’est pourquoi la mort est à ses yeux un événement qui n’a pas de sens […]. Dans les dernières œuvres de Tolstoï on trouve partout cette pensée qui donne le ton à son art. (p.91)

Vivre "pour" la politique ou vivre "de" la politique

Il y a deux façons de faire de la politique. Ou bien on vit « pour » la politique, ou bien « de » la politique. Cette opposition n’a absolument rien d ‘exclusif. Bien plutôt on fait en règle générale les deux à la fois, idéalement certes, mais aussi la plupart du temps matériellement. Celui qui vit « pour » la politique fait d’elle, dans le sens le plus profond du terme, le « but de sa vie », soit parce qu’il trouve un moyen de jouissance dans la simple possession du pouvoir, soit parce que cette activité lui permet de trouver son équilibre interne et d’exprimer sa valeur personnelle en se mettant au service d’une « cause » qui donne un sens à sa vie. C’est en ce sens profond que tout homme sérieux qui vit pour une cause vit également d’elle. Notre distinction a donc pour base un aspect extrêmement important de la condition de l’homme politique, à savoir l’aspect économique. Nous dirons donc que celui qui voit dans la politique une source permanente de revenus « vit de la politique » et que, dans le cas contraire, il vit « pour » elle. (p.143)

Les journalistes sans fortune empêchés dans leur ascension vers le pouvoir

On soupçonne très rarement que la responsabilité du journaliste est beaucoup plus grande que celle du savant et que le sentiment de responsabilité de tout journaliste honorable n’est en rien inférieur à celui de n’importe quel autre intellectuel – on peut même dire qu’il est plus élevé si l’on se réfère aux constations que l’on a pu faire durant la dernière guerre. Le discrédit dans lequel est tombé le journalisme s’explique par le fait que nous gardons en mémoire les exploits de certains journalistes dénués de tout sens de leurs responsabilités et qui ont souvent exercé une influence déplorable.

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Mais personne ne veut admettre que la discrétion du véritable journaliste est en général supérieure à celle des autres personnes. Cela est indéniable. Les tentations incomparablement plus pénibles qui sont liées à l’exercice de ce métier ainsi que les autres conditions de l’activité journalistique moderne impliquent certaines conséquences qui on habitué le public à considérer la presse avec un mélange de mépris et de lâcheté navrante […]. Mais il était cependant tout à fait exceptionnel – contre toute attente- de voir des chefs de parti sortir du rang du journalisme. Il faut en chercher la raison dans la « non- disponibilité » fortement accentuée du journaliste, surtout du journaliste qui n’a aucune fortune personnelle et qui de ce fait n’a d’autres ressources que celles que lui procure sa profession.

Cette dépendance est une conséquence du développement énorme, en taille et en pouvoir, de l’entreprise de presse. La nécessité de gagner son pain en rédigeant son article quotidien ou du moins hebdomadaire constitue une sorte de boulet que traîne tout journaliste et je connais parmi eux un certain nombre d’individus qui possédaient le tempérament d’un chef bien qu’ils aient été sans cesse paralysés, matériellement et moralement, dans leur ascension vers le pouvoir. (p.161)

Travailler pour l'amour d'un chef procure une plus grande satisfaction intime

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les « fonctionnaires » se soumettent avec une relative facilité à la personne d’un chef démagogique qui fait grande impression. Cela s’explique à la fois par le fait que leurs intérêts matériels et moraux sont intuitivement liés au rayonnement et à la puissance qu’ils souhaitent pour leur parti et par le fait que travailler pour l’amour d’un chef procure une plus grande satisfaction intime. (p.173)

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